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LE CENTRE SUPRÊME-IV

Le Centre suprême

‒ I V ‒

Baron Ungern Sternberg

Baron Roman von Ungern Sternberg en 1921 
(1886-1921)

Plan

PLAN

Véracité
RN 1 2 3
RN 4 5 6
ungern
R N 7 8 9
RN 10 11
un support RN 12
RN 13
R N 14 15
RN 16 17 empire
RN 18
RN 19 20
RN 21 22
RN 23
RN 24 25 26
RN 27
RN 28 mission
RN 29
RN 30 31
RN 32
RN 33
dernier
RN 34 35 36 37
RN 38
RN 39
RN 40 41
RN 42 43 44
RN 45 46
RN 47 48 49
Beasts, Men and Gods

1re édition, 1922

F. Ossendowsky

F. Ossendowsky en 1923

Comte Alexeï Alexandrovitch Bobrinski

Comte Alexeï Alexandrovitch Bobrinski (Алексей Александрович Бобринский) (1852-1927) Président de l’Assemblée de la noblesse de Saint-Pétersbourg (1876-1897), historien et archéologue, il occupa le poste de président de la Commission impériale d’archéologie (1889). Il fut également président de la banque anglo-russe (1915), directeur adjoint au ministère de l'Intérieur (1916), et ministre de l'Agriculture (1916).

Peter Alexandrovich Polovtsov

Peter Alexandrovich Polovtsov
(Пётр Александович Половцов) (1874-1964)

L’histoire du baron Ungern : expérience d’une reconstruction

S. L. Kuzmin, L’histoire du baron Ungern : expérience d’une reconstruction

(659 pp., Moscou 2011)

Le baron Ungern dans les documents et les mémoires

S. L. Kuzmin, Le baron Ungern dans les documents et les mémoires

(661 pp., Moscou 2004) 

 Le Baron légendaire : pages inconnues de la guerre civile

S. L. Kuzmin, Le Baron légendaire : pages inconnues de la guerre civile
(336 pp., Moscou, 2004)

Baron von Ungern-Sternber : Sa vie, son idéologie politique et ses campagnes militaires, 1920–21

E. Belov, Baron von Ungern-Sternber : Sa vie, son idéologie politique et ses campagnes militaires, 1920–21
(238 pp., Moscou, 2003)

M. S. L. Kuzmin

M. S. L. Kuzmin

Michel II

Le dernier tsar : Michel II (Михаил II)

Drapeau avec le monogramme de Michel II

Drapeau impérial de la Cavalerie asiatique d’Ungern-Sternberg portant le monogramme de Michel II (MII)

Drapeau impérial du 11e régiment de fusiliers sibériens

Drapeau impérial du 11e régiment de fusiliers sibériens portant le monogramme de Nicolas II (HII).

On peut voir que celui d’Ungern-Sternberg est analogue.

Femme mongole, 1913 (autochrome Albert Kahn)

Femme mongole, 1913
(autochrome Albert Kahn)

Monastère à Khuree, 1913 (autochrome Albert Kahn)

Monastère à Khuree, 1913 (autochrome Albert Kahn)

Danse rituelle Tsam

Danse rituelle Tsam

Danse rituelle Tsam

Danse rituelle Tsam

Kapâla contenant la bodhichitta

Kapâla contenant la bodhichitta blanche attisée par la force du feu intérieur (chandali)

Carte initiatique (tsakli)

Carte initiatique (tsakli)

Ungern-Sternberg en 1921

Ungern-Sternberg en 1921 lors de son procès par les bolcheviques

Le Bogdo Khan (1869-1924)

Le Bogdo Khan (1869-1924)

Bannière du Bogdo Khan

La bannière du Bogdo Khan

Il s’agit du Soyombo (du sanscrit : Swayambhû, qui signifie « Celui qui subsiste par Soi-même ». C’est le symbole d’un aspect de l’Être qui est le Logos envisagé comme le « lieu des possibles ». Cet idéogramme est apparu en 1686 dans une vision de Zanabazar (Jñanavajra) (1635-1723), le premier Jetsun Dampa Hutukhtu, qui avait réalisé les « grands mystères », c’est-à-dire l’« Homme Universel ».

IV  Roman von Ungern-Sternberg et le sort de la Mongolie

 

 

In memoriam 

comte Mikhaïl S.,

« Maître de la Rose » (Bey Gül)

« ...dogshin hürdün khan... »

 

 

Véracité du récit d’Ossendowski

             Le livre d’Ossendowski est le résultat d’une mise en forme littéraire de ses notes de voyage. Les évènements historiques relatés ne pouvaient être exposés qu’à partir de son expérience et non sur la base d’une quelconque documentation puisque son ouvrage ne fut publié qu’un an après son périple. À l’époque de sa première édition à New York en août 1922, il s’agissait de ce que l’on appelle un livre d’actualité. La description de la situation en Mongolie à cette période et la mention des noms propres d’un grand nombre de personnages qui y furent mêlés sont des preuves de la véracité de son récit. Ces preuves sont incontestables, nombreuses et maintenant facilement accessibles.

                 À titre d’exemple, et parce que ses Mémoires ont été traduits en français en 2010, le banquier Dimitri Perchine écrivait : « On se préparait en hâte à marcher sur Kiakhta. Au même moment ou juste un peu avant, Ossendowski arriva à Ourga. Là, il fut conseiller ou quelque chose de ce genre auprès du baron. » (1) Il y a aussi le récit du Dr Riabhukin qui resta neuf mois dans les rangs de l’armée d’Ungern-Sternberg de la prise d’Urga jusqu’à la trahison par ses officiers, dans laquelle il fut impliqué – ce qui rend irrecevable certaines de ses remarques sur son ancien chef –, récit qui confirme plusieurs détails rapportés par Ossendowski qu’il rencontra d’ailleurs à cette époque. (2)

                    La présence des témoignages qui figurent dans Le mors aux dents (Paris, 1937), récit romancé et tendancieux de la carrière d’Ungern-Sternberg par l’écrivain communiste Vladimir Pozner (3), indiquent que René Guénon avait également quelques possibilités de vérifications de certains aspects historiques. Non seulement auprès d’Ossendowski lui-même, qu’il rencontra et eut l’occasion d’interroger, mais également auprès des émigrés russes ou polonais à Paris. À propos de la carrière mouvementée du baron, il remarquait qu’« il avait été déjà question autrefois, sous un aspect différent du reste, dans l’ouvrage de M. Ferdinand Ossendowski, Bêtes, Hommes et Dieux. Ce qui est vraiment assez curieux, c’est que l’existence même du personnage fut alors mise en doute par certains, et que la même chose s’est reproduite encore cette fois. »

                   Dans son compte rendu du livre de Pozner, pour donner une idée plus exacte du baron, Guénon s’appuie sur des lettres privées du major Antoni Alexandrowicz qui suggèrent qu’il pourrait en être le destinataire. (4) Les lettres de ce commandant de l’artillerie mongole, sous les ordres directs d’Ungern-Sternberg en 1918 et 1919, datent en effet de 1924, c’est-à-dire de la même année que celle de la parution du livre d’Ossendowski en France et des premiers textes de Guénon sur le « Roi du Monde. » (5) Les possibilités de vérifications auprès d’émigrés russes étaient d’autant plus faciles pour René Guénon qu’il était en relation avec les membres d’une Loge russe à Paris, la Loge Astrée, qui relevait de la Grande Loge de France. À la fin des années Vingt, on y travaillait surtout à l’étude de ses livres. (6) Celui que Guénon voyait le plus souvent était le comte Alexandre Mordvinoff, qui permit en 1947 la création de la Loge « La Grande Triade », mais il connaissait et recevait chez lui, à Paris, entre autres membres de cette Loge, le comte Alexandre Bobrinsky, le général Polovtsoff, ancien gouverneur de Petrograd, et le général Golejinski.

 

Ungern-Sternberg

 

                 René Guénon considérait, très justement, que le livre de Pozner « est un récit “romancé” et très “poussé au noir” par un évident esprit d’hostilité partisane » sur le baron. On sait maintenant qu’il avait parfaitement raison, une fois de plus. Pour en donner une idée plus juste, il citait alors des passages de lettres du major Alexandrowicz : “Le baron Ungern était un homme extraordinaire, une nature très compliquée, aussi bien au point de vue psychologique qu’au point de vue politique. Pour donner d’une façon simple ses traits caractéristiques, on pourrait les formuler ainsi : 1° il était un adversaire acharné du bolchévisme, dans lequel il voyait un ennemi de l’humanité entière et de ses valeurs spirituelles ; 2° il méprisait les Russes, qui à ses yeux avaient trahi l’Entente, ayant rompu pendant la guerre leur serment de fidélité envers le tsar, puis envers deux gouvernements révolutionnaires, et ayant accepté ensuite le gouvernement bolchéviste ; 3° il ne tendait guère la main à aucun russe, et il fréquentait seulement les étrangers (et aussi les Polonais, qu’il estimait à cause de leur lutte contre la Russie) ; parmi les Russes, il préférait les gens simples aux intellectuels, comme étant moins démoralisés ; 4° c’était un mystique et un Bouddhiste ; il nourrissait la pensée de fonder un ordre de vengeance contre la guerre ; 5° il envisageait la fondation d’un grand empire asiatique pour la lutte contre la culture matérialiste de l’Europe et contre la Russie soviétique ; 6° il était en contact avec le Dalaï-Lama, le “Bouddha vivant” [le Jetsun Dampa] et les représentants de l’Islam en Asie, et il avait le titre de prêtre et de Khan mongol ; 7° il était brutal et impitoyable comme seul un ascète et un sectaire peut l’être ; son manque de sensibilité dépassait tout ce qu’on peut imaginer, et semblerait ne pouvoir se rencontrer que chez un être incorporel, à l’âme froide comme la glace, ne connaissant ni la douleur, ni la pitié, ni la joie, ni la tristesse ; 8° il avait une intelligence supérieure et des connaissances étendues ; il n’y avait aucun sujet sur lequel il ne put donner un avis judicieux ; d’un coup d’œil, il jugeait la valeur d’un homme qu’il rencontrait... »

             En conclusion, Guénon écrivait à l’attention des lecteurs du livre de Pozner qu’ils pourront voir, d’après ces indication du Major, « si un personnage de cette sorte put n’être au fond, comme il [Pozner] l’insinue, qu’un simple agent au service du Japon, ou s’il ne fut pas plus vraisemblablement mû par des influences d’un tout autre ordre. » (7) La publication à Moscou, en 2011, par M. Serge Kuzmin d’un remarquable ouvrage documentaire intitulé История барона Унгерна: опыт реконструкции (Histoire du baron Ungern : expérience d’une reconstruction), confirme ce que nous étions le seul à écrire il y a une dizaine d’années. (8) Cette étude, conclusion d’un examen minutieux d’archives russes et mongoles découvertes par l’auteur, complète ses deux précédents volumes de documents publiés en 2004. (9) Pour Willard Sunderland, les livres d’Eugène Belov (Барон Унгерн фон Штернберг. Биография. Идеология. Военные походы 1920-1921 гг. [Baron von Ungern-Sternberg : Sa vie, son idéologie politique et ses campagnes militaires, 1920–21], Moscou, 2003) et ceux de S. Kuzmin fournissent à ce jour le portait le plus complet d’Ungern dans la littérature universitaire. Avant ces publications, les études sérieuses n’existaient pas. Les écrivains soviétiques – à la fois pendant la guerre civile et après – le dépeignaient comme un « vicieux bandit “semenovite” » – et utilisèrent son nom, en parlant de l’Ungernoshchina, pour qualifier le caractère ténébreux de son époque. En Occident, suivant les Soviétiques par idéologie, imitation ou en en prenant simplement le contrepied, il a été rapidement transformé en « Baron sanglant », en « Baron fou », en « l’Héritier blanc de Genghis Khan », surnoms auxquels s’ajoutèrent de nombreux autres. Pour ces raisons, le personnage historique, occulté sous les caricatures, disparut sous les épithètes. (10)

            Grâce aux travaux de M. Kuzmin, on dispose maintenant d’une véritable somme, désormais indispensable à toute étude sur Ungern. Elle renouvelle entièrement le sujet et, nous l’avons déjà dit, rend caduque tous les textes qui l’ont précédé. Ces travaux confirment la plupart des indications du Major, et l’avis de Guénon. M. Kuzmin a notamment prouvé que Ungern-Sternberg ne bénéficia d’aucun soutien logistique et financier de la part des Japonais (11), contrairement aux affirmations de Pozner, et aussi d’Owen Lattimore, l’ami et informateur de M. Pallis. Ce n’était là qu’un élément de la propagande calomnieuse des Soviétiques. Ces travaux de M. Kuzmin démontrent que Ungern-Sternberg était l’un des très rares individus à cette époque qui avaient une perception à peu près exacte de l’ensemble des évènements, avec leurs implications, et un point de vue traditionnel qui s’étendait au-delà des formes particulières (12). Le plus remarquable chez lui, outre sa bravoure, était sans doute sa grande solitude dans la vérité.

Un support d’influences traditionnelles

                 En 2011, dans son compte rendu du livre de M. Kuzmin, Istorija Barona Ungerna: opyt rekonstrukeii (Histoire du baron Ungern : expérience d’une reconstruction), Mme Dany Savelli a perçu confusément cet aspect chez Ungern-Sternberg en rappelant « la dimension messianique de sa pensée politique. » Dimension qui ne contredit pas le fait qu’il fut également « un géopoliticien averti » contrairement à ce qu’elle affirme. On comprend que pour une mentalité moderne comme la sienne cette dimension ne peut être qualifiée que d’« irrationnelle » selon le terme péjoratif et convenu qui n’explique rien. Elle prétend que l’« eschatologie » d’Ungern était « assez confuse », et croit pouvoir corriger une hypothèse avancée par Leonid Youzéfovitch dans sa biographie consacrée au baron, biographie d’ailleurs romancée et par conséquent sans intérêt d’un point de vue historique. (13) D’après Mme Savelli, « le “M” brodé sur les drapeaux de la Cavalerie asiatique ne serait pas tant l’initiale du grand-duc Mihail Alexandrovich assimilé à l’archange Michel, comme on l’a souvent pensé, que l’initiale de Maitreya, le Bouddha du futur, souvent considéré à tort comme un messie par les Occidentaux. » Nous avons dit qu’elle « croit corriger » M. Youzéfovich parce que celui-ci a bel et bien mentionné ce point dans le chapitre qui s’intitule d’ailleurs « Michel, Michael, Maïdari » (Maïdari est la forme mongole de Maitreya). (14) Comme l’indiquent les interrogatoires effectués après la capture d’Ungern, ce « M » est celui du grand-duc Michel en faveur duquel Nicolas II avait abdiqué le 15 mars 1917 (15). Michel était devenu ainsi le tsar légitime. Il fut le premier membre de la famille impériale à être assassiné en juin 1918 par la police secrète de Lénine, mais la nouvelle de sa mort fut tenue secrète par son Bureau de désinformation. Il n’en demeure pas moins que ce « M » qui intriguait tant certains est aussi, d’un point de vue symbolique, l’initiale de Monarchia. Il est ce « M » qui se transforme en une aigle impériale dans la vision de Dante décrite au chant XVIII du Paradis. (16) Même s’il sera certainement difficile à Mme Savelli comme à bien d’autres de l’admettre, la raison en est que le baron Roman von Ungern-Sternberg participait d’une fonction apocalyptique et qu’il en manifesta brièvement un aspect dans l’histoire. (17)

Un empire traditionnel

               Bien entendu, il est absurde, contrairement à ce qu’écrit Mme Savelli, de dénier à Ungern-Sternberg en raison de son échec ce qu’elle appelle une vision géopolitique cohérente, à savoir le rétablissement de la monarchie en Russie et la constitution d’un empire traditionnel centrasiatique (sredinnoe mongol’skoe tsarstvo) sous tutelle mandchoue. Dans une lettre du 20 mai 1921 à K. Gregory, son agent à Pékin, il indiquait qu’il voulait unir la Mongolie intérieure et extérieure afin de constituer un noyau pouvant rassembler tous les peuples mongols. (18) Il avait établi des relations avec les Kirguizes et « écrit à Boukey-Khan, ancien membre de la Douma, un patriote très instruit, descendant des khans de l’ordre des Boukeev (de l’Irtych à la Volga) et influent parmi le gouvernement de l’Alach-Ordi. » Il voulait que l’on agisse de la sorte « avec le Tibet, la Chine Orientale, le Turkestan et, avant tout, le Xinjang. » Il disait aussi qu’il était « primordial d’intéresser [aux tractations] les musulmans chinois. » Il n’est pas inutile de remarquer que tout cela correspond à ce que lui fait dire Ossendowski dans Bêtes, Hommes et Dieux : « Pendant la guerre, nous vîmes se corrompre peu à peu l’armée russe, nous prévîmes la trahison de la Russie envers les Alliés et le danger menaçant de la révolution. Afin de réagir, nous formâmes le projet d’unir tous les peuples mongols qui n’avaient pas oublié leur ancienne foi et leurs vieilles coutumes, dans un seul État asiatique, composé de tribus autonomes, sous la souveraineté morale et législative de la Chine, patrie de la plus ancienne et de la plus haute des civilisations. Cet état devait comprendre les Chinois, les Mongols, les Thibétains, les Buriats, les Kirghiz et les Kalmouks. » (19)

              Il va de soi qu’une conception juste des choses qui n’est pas acceptée et qui ne parvient pas à s’imposer n’en reste pas moins juste ; inversement, une conception fausse qui se répand et réussit à s’établir n’en devient pas pour autant juste et vraie. (20) Dire que la géopolitique d’Ungern-Sternberg « était en porte-à-faux avec les aspirations des peuples concernés » est une affirmation qui ne tient aucun compte de ses lettres montrant sa volonté de rassembler les peuples mongols. Cela revient à entériner les falsifications de l’historiographie soviétique en ignorant, de façon significative, les méthodes criminelles, et notamment les assassinats de masse par lesquelles furent instaurés les régimes communistes en Asie centrale, régimes qui n’eurent certes pas grand-chose à voir avec les aspirations des peuples en question.(21) En 1924, la Mongolie est devenue le premier pays satellite de L’U.R.S.S. On ne peut certainement pas déclarer que c’est ce que souhaitaient les Mongols puisque les Premiers Ministres, Peljidin Genden et Anandin Amar, par exemple, qui s’opposèrent à la politique soviétique en Mongolie furent exécutés à Moscou en 1937 et 1941. Que dire aussi de l’exécution d’Elbegdorj Rinchino en 1937 ? (22)

              Mme Savelli pense-t-elle que le développement d’Oulan-Bator dans le style boursoufflé de la sinistre architecture soviétique exprimait l’âme du peuple mongol et traduisait ses vœux ? Charles R. Bawden a fait remarquer que « pratiquement rien ne subsiste à Oulan-Bator qui permette de penser qu’il s’agit de l’ancienne Urga, celle qui fut le centre du Lamaïsme mongol et la rivale de Lhassa pour la splendeur artistique. » (23) Si l’architecture traditionnelle n’est pas une preuve suffisante pour Mme Savelli, malgré son évidence, on peut alors lui demander si elle n’a jamais entendu parler des trente mille soldats soviétiques stationnés en Mongolie, à partir de 1937, sous la direction de Mikhail Frinovsky, un chef du NKVD ? Ignore-t-elle que le retrait des troupes soviétiques en Mongolie n’eut lieu qu’en 1987 ? Nous ne croyons pas qu’elle puisse tout de même penser, sans prendre le risque de se discréditer complètement, que l’assassinat, l’emprisonnement et la déportation de plus d’une centaine de milliers de Mongols ou le pillage et la destruction quasi totale des monastères, le retour obligatoire des Lamas à la vie laïque – pour ceux qui n’avaient pas été assassinés – ou le remplacement de l’alphabet mongol par l’alphabet cyrillique – russe donc – exprimaient des « revendications nationales »… La « revendication nationale », si on peut appeler les choses ainsi, ne fut autre en Mongolie que celle prononcée par le Bogdo Khan en 1911, et que seul le Tibet, parmi toutes les nations sollicitées, accepta de reconnaître. (24) Le seul étranger qui défendit cette « aspiration nationale » fut précisément Ungern-Sternberg. (25)

                 Mme Savelli croit-elle que la meurtrière politique soviétique des nationalités, établie sur la base de la doctrine marxiste-léniniste, respectait les aspirations de ces peuples ? (26) Que signifie aujourd’hui cet aveuglement qui relève de l’imposture historiographique et du négationisme ? Ne sait-elle pas que le dictateur Choibalsan, qui ordonna l’exécution des Lamas et la destruction systématique des temples bouddhistes n’était que l’« homme de paille » de Staline ? N’a-t-elle pas vu que les conceptions géopolitiques qui ont triomphé sont précisément celles qui étaient les plus fausses ? Leur cortège de désastres qui se perpétuent encore de nos jours est pourtant malheureusement là pour nous le rappeler régulièrement. Que doit-on déduire du fait que ni Mme Savelli ni la plupart des « spécialistes » françaises de la Mongolie n’évoquent jamais les massacres de masse en Mongolie ? Faut-il entendre cet assourdissant silence comme un aveu d’approbation idéologique ? Est-ce au nom du « progrès économique et social » qu’il leur faut taire le martyre du peuple mongol ? Ou serait-ce parce que la négation de ce passé participe à empêcher leurs étudiants et leurs lecteurs d’avoir une intelligence véritable du présent ?

                  En réalité, Mme Savelli, Maître de Conférences à l’Université de Toulouse, n’a fait qu’adopter le point de vue révisionniste et propagandiste de l’historiographie soviétique, en particulier celui d’une prétendue « révolution » du peuple mongol et de son autodétermination au XXe siècle. On sait bien pourtant aujourd’hui que les historiographes communistes mirent en scène une initiative mongole à chaque étape du cours de l’histoire de l’intervention soviétique en Mongolie. Mme Dominique Dumas le remarque ironiquement : « Ainsi, les Mongols auraient bien eu leur propre Lénine (en la personne de Sükkbaatar, un militaire nationaliste qui n’avait rien de commun avec l’intellectuel marxiste dont il était supposé être l’homologue) et il y aurait bien eu en 1919 des “révolutionnaires” mongols (deux groupes ou “cercles” regroupant chacun une dizaine de personnes) qui auraient constitué un Parti populaire mongol, puis un gouvernement provisoire, puis pris l’initiative de demander l’aide de l’Union soviétique, suscitant ainsi son intervention. Et ce sont toujours ces institutions fantoches du “gouvernement provisoire” et du “Parti populaire mongol” qui auraient décidé le 28 juin 1921 de “libérer” la capitale mongole des Gardes Blancs d’Ungern-Sternberg. » Mme Dumas concluait très justement, « les Mongols ne furent bien sûr pas plus maître de leur destin que ne le fut le reste des peuples qui se trouvèrent subordonnés au pouvoir soviétique – en particulier les petits peuples asiatiques membres de la fédération de Russie ou de l’Union. » (27) L’histoire dramatique des Mongols au XXe siècle ne fut pas celle d’une succession de prétendues décisions d’un « Bureau politique » ou de divers « Congrès du Parti », mais celle du long et meurtrier combat d’un peuple martyrisé pour son identité traditionnelle.

              Il faut préciser enfin que si l’union des peuples mongols voulue par Ungern n’était pas sans s’accorder avec les idées panmongoles, c’était d’abord une confédération panbouddhiste qui était l’objectif visé, c’est-à-dire une union des peuples établie sur une base strictement traditionnel et non pas simplement ethnique. (28) Il est vrai que la plupart des auteurs modernes, plus ou moins spécialistes de ces questions, n’ont pas une idée bien précise de la véritable nature des formes traditionnelles et de leur importance.

Mission d’Ungern-Sternberg

                 En 2006, dans la Postface de sa traduction française au récit de Dimitri Perchine, Mme Savelli, sans doute naïvement impressionnée par son titre de baron, écrit que Ungern a « persisté à penser en termes de classes » (p. 201) sans même s’apercevoir qu’en parlant ainsi elle en dit beaucoup plus sur elle-même que sur Ungern-Sternberg. En réalité, ce sont surtout les bolcheviques qui pensaient et agissaient en termes de classes (29). La lutte des classes est le concept fondamental de la philosophie politique marxiste, et la remarque de Mme Savelli révèle ainsi qu’elle ne fait que suivre un point de vue néo-marxiste. Point de vue particulièrement erroné qui – faut-il le préciser ? – n’a jamais permis une lecture véritable de l’Histoire. Si les classes sociales existent et qu’il faut bien tenir compte, elles ne jouaient pas un rôle prépondérant dans la perspective plus ou moins traditionnelle d’Ungern-Sternberg.

                      Mme Savelli prétendait également déjà qu’il est « demeuré sourd aux revendications nationales qui fusaient de toutes part dans l’empire » alors que, comme nous venons de le dire, son action et ses lettres politiques montrent exactement le contraire (30), sans qu’il perdît de vue en même temps, de manière concrète et en considération de la situation internationale, que ces « revendications » ne pouvaient aboutir qu’à l’intérieur d’un empire. C’est d’ailleurs ce qui est effectivement advenu de la manière inversée et effroyable que l’on sait avec la constitution de l’U.R.S.S… Quels que furent les torts de la dynastie mandchoue, elle valait mieux pour tous les peuples concernés, si elle avait pu être rétablie, que tout ce qui est survenu après elle. (31)

                 Ce n’est donc qu’un coup de pied de l’âne que donne Mme Savelli quand elle reprend à son compte la misérable remarque des bolcheviques selon laquelle Ungern-Sternberg n’était pas « doté d’une vue étatique d’ensemble », lancée lors de la parodie de « procès » qui lui fut infligée. (32) À moins qu’il s’agisse d’un gage donné aux commissaires politiques qui veillent à maintenir la consanguinité idéologique d’un certain milieu universitaire français, c’est-à-dire à ceux qui décident des carrières, elle ne semble pas se rendre compte de ce qu’elle avoue ainsi. Contrairement à ce qu’elle écrit enfin, selon un argument qui relève du « darwinisme social », nous ne voyons pas ce qu’il y a de « peu glorieux » dans la fin d’Ungern-Sternberg ni en quoi celle-ci indiquerait que ses conceptions étaient fausses ? Pour Mme Savelli la domination des plus pervers et des plus forts va-t-elle dans le sens du progrès et de l’histoire ? Cette domination va certainement dans le sens de l’histoire, mais nous ne pensons pas qu’elle sache que « l’époque actuelle, par là-même qu’elle correspond aux dernières phases d’une manifestation cyclique, doit en épuiser les possibilités les plus inférieures. » (33)

         Sans évidemment vouloir dire que l’un et l’autre furent des cas équivalents, mais seulement en raison de certaines analogies, on peut lui demander ce qu’elle pense alors de la fin « peu glorieuse » de Jeanne d’Arc sur un bûcher, et des accusations portées contre elle ? Ce qui est « peu glorieux » ce sont évidemment les Soviétiques qui calomnièrent Ungern-Sternberg et tous ceux qui leur emboîtèrent le pas jusqu’à nos jours – par servilité, idéologie, panurgisme ou hébétude intellectuelle –, ce sont les traîtres qui l’abandonnèrent ou le livrèrent, et ceux qui prétendirent le criminaliser, et le juger dans un simulacre de procès aux ordres de Lénine.

             Mme Savelli n’a manifestement pas perçu le caractère profondément « christique » de cette fin. Si l’on trouve singulier l’emploi d’un tel qualificatif pour un « bouddhiste tantrique » comme l’était Ungern-Sternberg, c’est simplement parce que l’on ignore la science initiatique de la typologie spirituelle universelle et fondamentale lors de la dernière partie du cycle humain. À savoir que toutes les fonctions traditionnelles d’Orient et d’Occident, qu’elles soient spirituelles ou temporelles, sont recouvertes par l’ombre de la Parousie, et la préfigurent sous un aspect ou un autre.

 

Le dernier rempart

 

                  En oubliant ce qu’est une guerre, la disproportion des forces en présence et les ignobles méthodes d’encadrement de l’Armée rouge à laquelle Ungern-Sternberg faisait face, on a fréquemment mis en avant sa brutalité impersonnelle comme une preuve de son déséquilibre. Nous croyons pourtant que sa dureté ne faisait que répondre à la férocité sanglante des méthodes criminelles mises en place par Trotsky. Dès 1917, ce dernier annonçait que « la terreur va prendre des formes très violentes. » Devenu chef de l’Armée rouge, il jugera naturel que le commandement place ses soldats « devant le choix d’une mort possible à l’avant ou d’une mort certaine à l’arrière. » (34) Nicolas Werth a montré, à partir des archives de la période 1917-1921, que « l’exercice de la terreur comme mode de gouvernement » fut conçu bien avant le déclenchement de la guerre civile et n’en fut donc pas une conséquence. La très précoce impulsion criminelle revient à Lénine et Trotsky. » (35) En 1918, des Commissaires du peuple eux-mêmes demandèrent, sans succès, que fut limité le zèle de la Tchéka (36), la police politique secrète, organisme au centre du dispositif révolutionnaire, responsable d’arrestations arbitraires, de tortures et d’exécutions à grande échelle, qu’ils qualifièrent d’« organisation truffée de criminels et de sadiques, d’éléments dégénérés du lumpenprolétariat. » (37)

               L’attitude d’Ungern-Sternberg se comprend aussi sans difficulté si l’on tient compte de la profonde disparité existant entre la gravité historique de la situation et la qualité morale et militaire du milieu sur lequel il était obligé de s’appuyer, milieu similaire à celui dépeint par Koltchak en termes de déchéance morale, de lâcheté, de rapacité et de traîtrise. Devant la faiblesse de ses troupes, sous tous les rapports, on ne voit pas quelle autre attitude aurait pu adopter Ungern, ou tout autre chef de guerre digne de ce nom, pour tenter d’y remédier.

               Malgré l’existence de témoignages en sa faveur, tout le monde, avant M. Kuzmin et nous-même, a aveuglément suivi la propagande soviétique et présenté Ungern-Sternberg comme une sorte d’aventurier fou et cruel. N’avait-il d’ailleurs pas dit lui-même à Ossendowski qu’il en serait ainsi ? En réalité, soulignons-le pour ceux qui ont quelques difficultés de compréhension : Ungern-Sternberg fut le dernier rempart des Mongols contre la destruction du Bouddhisme mongol, les massacres de masse et le régime de terreur dans lequel devait être enfermée la Mongolie extérieure pendant soixante-dix ans. Cette propagande contre lui obéissait au principe du renversement des accusations dont les communistes furent coutumiers. Elle apparaît ainsi comme une atroce et perverse plaisanterie pour masquer l’assassinat, la torture et l’emprisonnement d’une centaine de milliers de Mongols, à partir de 1921, par les services mongols de la Sécurité d’État aux ordres des Soviétiques ainsi que le prouvent aujourd’hui les archives du gouvernement mongol. (38)

              Si le panurgisme des détracteurs d’Ungern-Sternberg pouvait à la rigueur se comprendre à l’époque soviétique chez les esprits faibles ou corrompus, après les travaux de M. Kuzmin, il est aujourd’hui beaucoup plus suspect, surtout quand ce dénigrement est associé systématiquement à une décontextualisation à peu près complète. C’est évidemment cette décontextualisation qui nous a amené à rappeler certains points que d’aucuns aimeraient certainement faire oublier. Mme Dominique Dumas, qui a sans doute moins de crainte pour sa carrière universitaire que Mme Savelli, a signalé que les publications françaises consacrées à l’histoire politique de la Mongolie, et qui sont censées faire autorité, « reproduisent essentiellement le point de vue et les thèses de l’historiographie d’époque soviétique. » (39) Toutefois, il doit être bien entendu et tout à fait clair qu’il ne s’agit pas ici pour nous de défendre la mémoire d’Ungern-Sternberg pour des raisons politiques, mais seulement d’examiner les faits d’un point de vue traditionnel.

               Mme Savelli indique qu’« entre le dément sanguinaire et le saint vénéré par une secte moscovite, il faudra trouver une juste mesure et se soucier moins d’accabler ou de justifier Ungern que de dire les faits tout en analysant les formes et les raisons du mythe. » Certes, « dire les faits » est une première chose essentielle, mais elle n’est pas suffisante en soi : connaître un fait ne donne pas sa signification. Grâce à M. Kuzmin cette condition préalable à la moindre étude sérieuse ne se pose plus : les faits sont désormais connus, autant qu’il est possible. Mme Savelli, qui s’abstient toujours soigneusement en revanche de contextualiser la situation d’Ungern en rappelant certains faits concernant ceux qu’il combattait, s’avère elle-même incapable de définir cette énigmatique « juste mesure » qu’elle évoque. Pourquoi d’ailleurs ne devrait-on pas justifier Ungern-Sternberg si les raisons pour lesquelles il fut si longtemps accablé sont mensongères ? Il n’y a pas de honte à justifier fût-ce devant des juges sans foi disait Bernanos. La question qui se pose devant ce qui se voudrait un appel cartésien au « bon sens » est de savoir quels sont alors les critères de vérité. Sont-ce les critères socio-psychologiques, foucaldiens, lyotardiens, derridiens, bourdieusiens ou ceux, finalement, néo-marxistes de Mme Savelli ? Contrairement à ce que pensent les nihilistes, qu’ils soient conscients ou inconscients, il y a un point fixe à partir duquel on peut étudier objectivement non seulement l’histoire, mais également toutes choses : c’est le point de vue traditionnel.

                 En croyant à la fiction élaborée par l’historiographie soviétique à des fins de propagande et en s’employant encore aujourd’hui à diffuser cette représentation trompeuse de la réalité, vingt ans après la disparition de l’U.R.S.S., Mme Savelli nous montre seulement qu’au-delà des idéologies, il y a toujours des auxiliaires qui participent, consciemment ou inconsciemment, à favoriser activement l’intervention des mêmes forces anti-traditionnelles, dissolvantes et destructrices. (40) Mme Savelli est sans doute de bonne foi, mais l’on sait que ceux sont qui sont les plus sincères et les plus aveuglés sont généralement les plus dangereux.

             On peut maintenant se poser la question de savoir si la mission d’Ungern-Sternberg en Mongolie fut un échec complet. La trahison dont il fut victime puis son assassinat (41) mirent évidemment fin à certaines possibilités traditionnelles, mais la libération du Bogdo Khan et sa prise d’Urga avaient donné un coup d’arrêt définitif à l’invasion chinoise. Sans la mise en fuite des Chinois, les Soviétiques n’auraient pu intervenir comme ils l’ont fait. Certes, Lénine avait clairement exprimé ses intentions sur l’Asie centrale en octobre 1916, et dès 1918 des agents bolcheviques pénétrèrent en Mongolie, mais si Ungern a pu servir de prétexte aux bolcheviques russes, c’est la situation qu’il avait créé qui permit en réalité leur intervention et non pas une volonté politique. M. Kuzmin note que la Mongolie est alors redevable de son indépendance actuelle à Ungern-Sternberg. En effet, la domination soviétique – malgré les épouvantables vicissitudes qu’elle fit subir aux Mongols – eut au moins l’avantage de permettre à la Mongolie de se maintenir comme un État indépendant, à la différence de la Mandchourie, de la Mongolie intérieure et du Tibet intégrés dans la Chine communiste.

              On ne peut donc parler d’un échec complet au sujet du rôle d’Ungern-Sternberg, mais plutôt d’une issue faussée pour reprendre l’expression employée par Michel Vâlsan à propos de l’échec de la « deuxième mission » de Jeanne d’Arc. Ce fut tout de même une issue et c’est grâce à elle que l’on doit un certain renouveau traditionnel aujourd’hui en Mongolie. (42) Toutefois, on ne doit pas perdre de vue, in fine, que c’est d’abord au Bogdo Khan qui proclama l’indépendance de la Mongolie en 1911, et qui fit ensuite appel à Ungern, que l’on doit ce résultat. (43) Le Bogdo Khan voyait plus loin et plus haut que tous les autres. (44) Son droit d’accéder au Trône d’Or lui fut conféré « directement du Ciel par le Verbe de Mañjushrî », la 11e année du 11e mois, c’est-à-dire l’année du Sanglier, pendant le mois du Sanglier. Il est sans doute inutile de préciser que ceux qui sont ignorants de la science des symboles ne peuvent comprendre ce que cela signifie.

Le Bogdo Khan

                À la suite de la propagande soviétique, on a aussi largement diffamé le huitième Jetsun Dampa Hutukhtu, c’est-à-dire le Bogdo Khan. Évidemment, ces calomnies ne sont qu’une des expressions de cette mentalité anti-traditionnelle qui est répandue à peu près partout et qui se manifeste spécialement chaque fois qu’il est question de certains personnages. (45) Si, à la lecture de la copie des « lettres pastorales » du Bogdo Khan édictées entre 1892 et 1901, conservées à Oslo et Copenhague, l’orientaliste allemand Walter Heissig, pour citer un auteur parmi d’autres, a bien été obligé de reconnaître sa « grande clairvoyance politique », il le décrit cependant comme un « ivrogne dépravé, que l’alcool avait rendu aveugle. » (46) Il y a encore un malentendu sur ce dernier point. Il est bien possible que le Bogdo Khan fût un dipsomane, mais dans le cas d’un tel personnage, détenteur d’une si haute fonction spirituelle, il ne faut pas voir ce trouble du point de vue seulement profane qui est toujours celui des Occidentaux.

           En effet, sans parler du cas extrême des Nyönpa (sanscrit : Avadhûta) (47), comme Gendün Gyatso, le deuxième Dalaï-Lama ou Drunkpa Kunley, l’introducteur du Bouddhisme tantrique au Bhutan, il est désormais bien connu que certains rituels des Tantras bouddhistes du Yoga suprême (Anuttarayoga Tantra) qui appartiennent à la plus haute des quatre divisions des tantras du Vajrayâna (48) impliquent notamment la consommation plus ou moins régulière d’alcool à l’instar de certains rites du tantrisme kaula dans l’Hindouisme (49). Bien que les informations à ce sujet soient généralement indirectes, nous savons que le Bogdo Khan...

C. G.

(À suivre)

 

 

La suite de cet article est contenue dans l'édition imprimée

du numéro 8 des Cahiers de l'Unité

citation

Pour citer cet article :

C. G., « Le Centre suprême (IV), Roman von Ungern-Sternberg et le sort de la Mongolie », Cahiers de l’Unité, n° 8, octobre-novembre-décembre, 2017 (en ligne).

 

© Cahiers de l’Unité, 2017  

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