top of page

QÂBA QAWSAYN - LA DISTANCE DE DEUX ARCS (VI)

Qâba Qawsayn

La distance des Deux Arcs (VI)

Mosquée Naçîr al-Mulk  Shiraz .png

Le Qâba Qawsayn 

chez le Cheikh al-Akbar (3e partie - suite)

Les commentaires des maîtres akbariens

RN 1 2 3
babouche manuscrit
Citation

       Quelques maîtres akbariens ont repris ces mêmes idées en les intégrant dans leur perspective personnelle. Nous mentionnerons seulement ici les passages auxquels nous avons emprunté précédemment le début de leurs commentaires, qui sont maintenant complétés par des données plus précises.

        Qashânî : « {Il se trouvait à la distance de Deux Arcs} : le Prophète était la mesure du cercle de la Réalité englobante du Tout, divisée par la ligne imaginaire en deux arcs, représentant symboliquement Dieu et la Création, et il s’identifiait ainsi au diamètre imaginaire divisant le cercle en deux parties. Sous le rapport du commencement et du rapprochement (at-tadânî) (1), c’est la Création qui est le premier Arc et qui cache l’Ipséité divine dans les déterminations existentielles et les formes des créatures ; Dieu est alors l’autre moitié, dont la Création se rapproche peu à peu jusqu’à s’effacer et disparaître en Lui (2). Par contre, sous le rapport de la fin et de la descente graduelle (at-tadallî) (3), c’est Dieu qui est le premier Arc, éternellement établi en Son état principiel sans commencement ni fin ; la Création est alors l’autre Arc, et elle est de nouveau produite après l’extinction [en Dieu mentionnée plus haut], grâce à l’existence nouvelle qui lui a été donnée.    

       {Ou plus près} que la mesure des deux Arcs : [le passage au-delà de cette vision distinctive s’opère] par la suppression de cette dualité séparatrice et imaginaire qui implique la réunion de chaque Arc avec l’autre, réalisant par là-même la Non-Dualité de la Wahdah véritable dans la multiplicité elle-même. Ainsi cette multiplicité disparaît en cette Non-Dualité principielle, et il ne reste plus réellement que le cercle non-divisé [en sa réalité primordiale, dans] l’Unité de l’Essence et des Qualités » (4).        

 

        Jurjânî : « La {Distance de deux Arcs} est la station de la Proximité liée aux Noms divins considérés dans leur opposition mutuelle au sein de la Réalité divine appelée la Sphère de la Réalité principielle (dâ’irat al-Wujûd), [opposition se manifestant par exemple] dans le commencement et le retour, la descente et l’ascension, l’activité et la passivité. Cette station, désignée aussi par le terme de “jonction” (ittisâl), exprime l’Unification [de l’être] (ittihâd) par le Dieu Réel, conjointement au maintien de la distinctivité [créaturielle]. Il n’y a pas de station plus élevée que celle-là, si ce n’est la station du {ou plus près}, qui est l’Unité essentielle de la Synthèse originelle (Ahadiyyah jam‘ al-‘ayn adh-dhâtiyyah), symbolisée par Sa Parole {ou plus près} : cette station implique la disparition de la distinctivité et de la dualité conceptuelle par l’extinction complète et l’effacement total de toutes les limites [existencielles] » (5).    

 

        Nous complétons ici la définition du « troisième voyage » résumée dans la première partie de cette étude (6). Cette modalité du voyage « implique la suppression de tout conditionnement engendré par les couples d’opposition ou de contraires tant extérieurs qu’intérieurs, par la réalisation de l’Unité de la synthèse essentielle. C’est l’ascension graduelle (taraqqî) jusqu’à l’essence de la Synthèse et jusqu’au degré de la Présence de l’Unité absolue. C’est la station appelée “à la distance de deux arcs” représentant la Dualité qui peut encore subsister. Quand cette Dualité se dissipe, on trouve la station désignée “Ou même plus près”. C’est l’ultime aboutissement de la Sainteté » (7).            

          L’auteur donne lui aussi des définitions techniques des modalités de la montée et de la descente reprenant en partie celles du Cheikh al-Akbar. « At-tadallî, la descente suspensive : c’est la descente des Rapprochés avec la prise de conscience lucide qu’ils recouvrent après leur ascension graduelle jusqu’au terme de leur itinéraire. C’est aussi la descende de Dieu le Réel depuis la Sainteté transcendante de Son Essence […] en fonction de l’ampleur ou la limitation de leurs aptitudes ». Quant à « at-tadânî, l’approche réciproque, c’est l’ascension des Rapprochés (mi‘raj al-muqarrabûn) qui s’opère en effaçant d’eux toute disposition préacquise […] et qui s’achève au degré de la Présence excellente du « Il était à la distance de deux arcs ». Cette approche reste sous le Statut de l’Héritage muhammadien qui prend fin au degré de la Présence du « Ou même plus près » qui est le principe même de l’Approche mutuelle » (8).      

 

      Nous ajouterons à ces références celle du petit traité de Jîlî, intitulé Qâba Qâwsayn, consacré en fait à la vénération et la dévotion au Prophète. Mais, contre toute attente, malgré son titre évocateur, l’auteur n’y développe que très peu ces aspects symboliques, et se borne à en résumer les idées principales conformes à ce qui précède dans un seul chapitre, où il interprète le diamètre du cercle du Tout universel comme étant la Réalité muhammadienne (9).     

 

4 - L’Unité et l’Unicité divine (al-Ahadiyyah et al-Wâhidiyyah)

             

         Il reste à voir une dernière interprétation de ce même symbolisme, toujours expressément basée sur la même démonstration, mais qui identifie cette fois-ci les Deux Arcs du cercle de la Totalité universelle non plus à Dieu et la Création, mais à l’Unité et l’Unicité divine, autrement dit, selon la correspondance que nous suivons dans nos interprétations, au Non-Être et à l’Être (10). Elle va nous permettre pour conclure de mettre à jour une équivalence encore plus précise, jusque dans l’expression formelle, avec les données védantines transmises par René Guénon que nous avons rappelées au départ de cette étude. Elle se trouve aussi dans la Prière sur le Prophète du Cheikh al-Akbar, où elle est ainsi directement formulée : « Sur le Diamètre de l’Un (al-Wahdah), tracé entre les “Deux Arcs” de l’Unité (al-Ahadiyyah) et de l’Unicité (al-Wâhidiyyah) ». Dans son commentaire auquel nous nous sommes déjà référé, M. Vâlsan précise que cet énoncé « constitue l’interprétation métaphysique du symbole des Deux Arcs » (11).    

        C’est cette explication qu’a reprise l’Émir dans la citation que nous avons rappelée plus haut, où il affirme que « {la distance de Deux Arcs} symbolise [la dualité de] l’Unité et de l’Unicité », et « le {ou plus près}la Non-Dualité de la Singularité essentielle (al-Wahdah), qui rassemble l’Unité et l’Unicité » (12).   

       

        Dans son « voyage divin », après la réintégration de l’ensemble des états manifestés, l’être atteint déjà le domaine d’Ishwara ou l’Être universel, « le Monde de Brahma “qualifié ”» dans le troisième état d’Atmâ (13)De la même manière, après les degrés... 

Jean-François Houberdon

(À suivre)

La suite de cet article est exclusivement réservée à nos abonnés ou aux acheteurs du numéro 19 des Cahiers de l'Unité

Pour citer cet article :

Jean-François Houberdon, « Qâba Qawsayn, la distance de Deux Arcs », Cahiers de l’Unité, n° 19, juillet-août-septembre, 2020 (en ligne).

 

© Cahiers de l’Unité, 2020 

RN 4
RN 5 - 6
RN 7
RN 8
RN 9 unicité divine

Qit‘a moghole

1249H/1833

Qit'€˜a moghole
RN 10
RN 11-12-13
bottom of page