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RÉMINISCENCE, INDIENNE ET PLATONICIENNE

Réminiscence, indienne et platonicienne

(Texte publié dans le n° d’avril-juin du Journal of the American Oriental Society, 1944)

[Les passages entre crochets sont du traducteur]

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Ananda K. Coomaraswamy

RN 1

Punar ehi vācas pate devena manasā saha /

vasoḥ pate ni ramaya mayy evāstu mayi śrutam // 

Atharva Veda, I, I, 2 (1)

 

Cathedram habet in caelo qui intus corda docet.

Saint Augustin, In epsit. Joanis ad Parthos.

 

« Mon Seigneur embrasse toutes choses dans Sa connaissance, 

ne vous en souviendriez-vous pas ? » 

Coran, VI, 80. Trad. A.J. Arberry.

RN 2 3 4

      Dans l’article suivant la doctrine selon laquelle ce que nous nommons « apprendre » est en réalité un « souvenir », et que notre « connaissance » se fait par participation à l’Omniscience d’un principe spirituel immanent, sera retracée à partir des textes indiens et platoniciens. Ceci correspond, dans la même Philosophia Perennis, à la doctrine selon laquelle le beau est tel par une participation à la Beauté, et que tout être est une participation à l’Être absolu.

 

        L’omniscience du principe spirituel immanent, intellectus vel spiritus, est le corrélatif logique de son omniprésence intemporelle. C’est seulement à partir de ce point de vue que le concept de Providence (prajñā, πρόνοια, προμήθεια) devient intelligible. Le Soi Providentiel (prajñātman) ne décide pas arbitrairement de notre « Destin », mais est le témoin de son opération : notre Destin est simplement l’extension temporelle de son acte d’être libre et instantané. C’est seulement parce que nous pensons à la Providence comme une connaissance anticipée du futur que nous sommes désorientés ; comme si nous demandions : « Que pensait Dieu dans un temps avant que le temps ne fût ! » En fait, la connaissance Providentielle n’est pas plus celle d’un futur que celle d’un passé, mais seulement celle d’un maintenant. L’expérience de la durée est incompatible avec l’omniscience, dont le soi empirique est par conséquent incapable.

          D’autre part, dans la mesure où nous sommes à même de nous identifier au Soi Providentiel lui-même – (Γνώθί σεαυτόν), Que tu es – nous nous élevons au-dessus des séquences du Destin, devenant leur spectateur plutôt que leur victime. Ainsi, la doctrine, selon laquelle toute connaissance est par participation, est inséparablement liée à la possibilité d’une Libération (mokṣa, λύσις) des paires d’opposés dont passé et futur, ici et là, sont les exemples pertinents dans le présent contexte. Comme Nicolas de Cues l’a exprimé, le mur du Paradis où demeure Dieu, est constitué de ces contraires, et le passage étroit vers l’intérieur, gardé par l’esprit de la Raison le plus élevé, réside entre eux. En d’autres termes, notre Chemin se trouve à travers le maintenant et le nulle part où l’expérience empirique est impossible, bien que le fait de la Mémoire nous assure que le Chemin est ouvert à Celui qui comprend la Vérité.

          La Gāyatrī (Ṛgveda, III, 62, 10) invoque Savitṛ afin « d’inciter nos intellections » (dhiyo yo naḥ pracodayāt), ou mieux, « nos spéculations » (2). Aitareya Āraṇyaka, II, 3, 5 nous dit que « le soi qui est dans la parole (vāc) (3) est incomplet, car on en aurait l’intuition (erlebt, anubhavati) (4) lorsqu’on est incité à penser...

      

 

Ananda K. Coomaraswamy

Traduit de l’anglais par Max Dardevet

 

La suite de cet article est exclusivement réservée à nos abonnés ou aux acheteurs du numéro 19 des Cahiers de l'Unité

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Citation

Pour citer cet article :

Ananda K. Coomaraswamy, traduit de l'anglais par Max Dardevet « Réminiscence, indienne et platonicienne », Cahiers de l’Unité, n° 19, juillet-août-septembre, 2020 (en ligne).

 

© Cahiers de l’Unité, 2020  

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